Je suis de retour en ville (Oaxaca) après trois semaines intenses et remplies d'émotions à Teotitlán del Valle.
À mon arrivée je me suis installée au même endroit que l'an passé à Las Granadas l'auberge de Josefina où j'ai été accueillie chaleureusement par cette bande de femmes: Josefina (la maîtresse des lieux), Lori (l'agente aux réservations et pâtissière), Rosario( femme à tout faire) et Magdalena (la belle-mère) toutes dédiées au bon fonctionnement de la concession qui abrite aussi la famille de Josefina, ses trois enfants et un beau-fils, tisserand. Las Granadas est situé au cœur du village au pied de l'impressionnant El Picacho
Ces fruits rouges que vous voyez dans les arbres sont les pommesgrenades qui trônent dans la cour de Josefina d'où le nom de l'auberge Las Granadas.
Les bonnes femmes ici s'affairent toute la journée sans répit puisque tout est fait à la main depuis les tortillas jusqu'aux frijoles en passant par la salsa, dans la cuisine extérieure.
Oups, une tortilla de ratée par Magdalena la belle-mère un peu malcommode qui ne voulait pas se retourner pour que je la photographie. Bien fait pour elle.
Je me devais de reprendre contact avec la famille Montano pour vérifier si la promesse de la permission d'utiliser le terrain de Fabian pour m'y construire une ''casita'' tenait toujours et quelles étaient les tenants et les aboutissants d'un tel projet.
À la première rencontre j'ai su que c'était du sérieux puisque Mercedez, une des sœurs de Fabian avait déjà planter six pousses d'arbres sur le terrain, un citronnier, un maguier, un manderinier, un oranger, et deux avocats, pour me faire plaisir. Il était évident pour eux que je devais venir habiter avec eux jusqu'à la construction de la maisonnette. C'était un peu trop pour moi sur le coup et j'ai préféré garder mes distances tout en continuant à apprivoiser la famille poco a poco.
J'ai pris de grandes marches avec Fabian pour comprendre son état d'esprit et j'allais fréquemment souper avec la famille pour en comprendre la dynamique. Il est devenu clair que Fabian, handicapé comme il est, souffre d'un désoeuvrement et d'un ostracisme impitoyables dans une société où il est essentiel d'avoir deux bras et deux jambes fonctionnels pour contribuer activement à la communauté. Il y a place pour des ''intellectuels'' dans la communauté mais encore faut-il que la famille ait les moyens de payer des études universitaires, ce qui n'est pas le cas de la famille Montano.
Peu à peu je devenais convaincue qu'une ''casita'' à Teotitlán me ferait un immense plaisir,un endroit idéal pour mes vieux jours (la diète de frijoles sera tout à fait adapté quand je serai édentée) et de mettre Fabian en charge d'un tel projet lui serait bénéfique moralement.
Je gagne automatiquement la complicité indéfectible de la famille et désormais je partage avec eux les us et coutumes zapotèques ainsi qu'un âne qui broute sur le terrain de Fabian durant le jour.
et un chien, Witcho, qui me fait de belles façons et avec qui je me promène sans crainte dans les sentiers, un ami fidèle.
Avant longtemps il a fallu commencer à planifier la construction de la ''casita''
Je me suis atteler bien innocemment au dessein d'un plan approximatif moi qui n'ai jamais construit de maison de ma vie. À chaque dessein, je recevais le regard douteux de mes interlocuteurs qui doutaient que je sois saine d'esprit. Au bout d'une semaine de tractations dans mon espagnol approximatif, entremêlé de commentaires en zapotèque j'ai finalement compris que ni Fabian , ni le constructeur désigné, ne savaient lire un plan et qu'une maison zapotèque se construit d'une seule façon, en tronçons de 8 mètres par 4 mètres et qu'il ne me restait seulement à décider où je voulais la porte d'entrée, les fenêtres et la salle de bain, cette dernière jugée comme un luxe de ''gringa''
Quand nous avons fini par nous entendre, il était déjà temps pour moi de partir pour le Guatemala et le début de la construction se fera en absence. À la grâce de Dieu, Oyala!
J'ai quelques jours à passer à Oaxaca avant mon départ pour le Guatemala et je m'ennuie déjà de la famille Montano.
Je fais le bilan de ce dernier mois et je me trouve transformée. J'ai la peau sèche d'un lézard, le teint halé d'une métisse, le sourire facile d'une maya, l'entêtement d'une zapotèque et suis désormais tatouée au dessus de la cheville gauche.
Il ne me reste plus qu'à rêver en espagnol et je pourrai peut-être me considérer comme intégrée.
A+ pour un compte rendu du séjour au Guatemala.
Muchos abrasos y hasta luego